Le Projet de Loi de Financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025, dévoilé par les ministères de l'Économie, du Budget et de la Santé, s'attaque de front au déficit de l'assurance maladie, devenu un gouffre pour les finances publiques. Près de 20 % des économies envisagées reposeront sur les épaules des complémentaires santé – mutuelles, compagnies d'assurance et institutions de prévoyance. Pour ces organismes, déjà fragilisés par des transferts de charges successifs, la nouvelle tombe comme un coup dur. Confrontés à des marges de manœuvre de plus en plus réduites, ils redoutent un impact direct sur les cotisations des assurés.
Un transfert de charges de 1,1 milliard d'euros vers les complémentaires
Face à un déficit croissant de l'Assurance Maladie, le gouvernement a décidé de solliciter fortement les organismes complémentaires santé dans le cadre du Projet de Loi de Financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2025. En transférant 1,1 milliard d'euros de remboursements vers ces mutuelles et assurances sangté, l'exécutif espère alléger les comptes publics, tout en maintenant un système de santé accessible. Ce transfert se traduira notamment par une hausse du ticket modérateur – la part des soins non couverte par la Sécurité sociale – pour les consultations chez les généralistes et sages-femmes, avec une augmentation prévue de 30 % à 40 %.
Si le montant du transfert est fixé, la mise en œuvre concrète de cette réforme reste floue. Geneviève Darrieussecq, ministre de la Santé, a laissé entendre que le débat parlementaire pourrait amener des ajustements. Des discussions avec les organismes complémentaires sont également prévues afin d'éviter une explosion des cotisations pour les assurés. Néanmoins, cette nouvelle charge, dans un contexte de dépenses de santé en hausse, inquiète les acteurs du secteur, déjà confrontés à des tensions financières croissantes.
Les mutuelles redoutent une hausse des cotisations
Pour les mutuelles et les assureurs, ce nouveau transfert de charges fait craindre une augmentation des cotisations, qui pourrait peser lourdement sur les ménages. Le dernier transfert de charges, notamment pour les soins dentaires, avait déjà entraîné des hausses que certains jugent "surévaluées". Un rapport du Sénat a d'ailleurs mis en lumière cet impact sur les cotisations, appelant le gouvernement à la prudence.
Geneviève Darrieussecq se veut rassurante, en affirmant que le gouvernement travaillera de concert avec les organismes complémentaires pour limiter les hausses. Mais sur le terrain, les inquiétudes demeurent, d'autant que la dynamique des dépenses de santé ne semble pas faiblir. En parallèle, le plafonnement des indemnités journalières en cas d'arrêt maladie, qui passera de 1,8 à 1,4 SMIC, pourrait également avoir des répercussions sur les contrats de prévoyance en entreprise. Le cabinet Galéa estime que cette mesure pourrait entraîner une hausse des cotisations de prévoyance de 3 % à 10 %, un fardeau supplémentaire pour les entreprises déjà sous pression.
Une stratégie globale pour maîtriser les dépenses de santé
Au-delà des complémentaires santé, le PLFSS 2025 s'inscrit dans une volonté plus large de contenir les dépenses de santé. L'objectif du gouvernement est de limiter la progression des dépenses de l'assurance maladie (Ondam) à 2,8 %, contre une tendance naturelle de 4,7 %. Cette maîtrise des coûts devrait permettre de réaliser environ 5 milliards d'euros d'économies. Parmi les mesures phares, un encadrement strict des soins de ville, avec une hausse limitée à 2 %, contre 3,1 % pour les hôpitaux, explique l'essentiel de ces économies.
Des efforts supplémentaires sont également attendus dans d'autres secteurs. La maîtrise des produits de santé doit générer 1,2 milliard d'euros d'économies, et une meilleure optimisation des achats dans les hôpitaux devrait rapporter 700 millions d'euros supplémentaires. Des régulations tarifaires sont prévues pour la biologie et l'imagerie médicale, tandis que des actions renforcées contre la fraude viennent compléter ce dispositif.
Malgré ces efforts, le déficit de l'assurance maladie ne sera pas totalement résorbé. Selon les prévisions du PLFSS, le déficit, estimé à 14,6 milliards d'euros en 2024, devrait se stabiliser à 13,1 milliards en 2025, avant de revenir autour de 14 milliards par an jusqu'en 2028. Une situation qui montre l'ampleur des défis à venir pour la Sécurité sociale, et la nécessité de réformes profondes pour assurer la viabilité du système à long terme.
La rédaction d'Assurland